Histoire de la rythmologie

La rythmologie cardiaque est une spécialité de la cardiologie qui concerne les troubles du rythme cardiaque, rapides (tachycardies), lents (bradycardies) ou irréguliers (extrasystoles, fibrillation des oreillettes). Elle s’est individualisée du fait de méthodes d’investigations particulières et de traitements non pharmacologiques nécessitant une formation particulière des médecins.

Depuis l’antiquité les anomalies du rythme du pouls ou des bruits du cœur étaient considérées comme annonçant un risque inquiétant de maladie cardiaque. Ces troubles peuvent être asymptomatiques, se manifester par des palpitations, être une des causes de syncopes, de mort subite. La compréhension des troubles du rythme cardiaque est devenue possible en 1903 avec l’invention de l’électrocardiographe par le physiologiste hollandais Willem Einthoven. Les études initiales du cardiologue anglais Thomas Lewis, suivies de beaucoup d’autres, en particulier en Europe et aux Etats-Unis ont permis d’en comprendre les mécanismes. Enfin à partir des années 60, les connaissances dans ce domaine vont considérablement s’étendre et permettre de proposer des traitements plus efficaces, avec le cathétérisme cardiaque, les électrocardiogrammes endo- cavitaires, la stimulation électrique des mêmes cavités, ainsi que l’enregistrement continu ambulatoire de l’ECG, dit « de Holter » du nom de l’inventeur du procédé.

Les bradycardies graves n’ont pas eu de traitement avant la stimulation électrique du cœur, d’abord à partir de générateurs externes en 1951, puis miniaturisée grâce aux premiers transistors, boitiers de stimulateurs cardiaques devenus ainsi implantables en sous cutané au début des années 60, avec des électrodes d’abord cousues sur le cœur, puis avec des sondes introduites par voie veineuse dans ses cavités. Depuis ce sont des micro-ordinateurs implantés, dont certains directement dans le ventricule droit.

La plupart des tachycardies restent prévenues de nos jours par des prises régulières de médicaments dits antiarythmiques, découverts au fil du vingtième siècle.  On peut en interrompre les accès par des injections intraveineuses avec les mêmes substances. La première interruption non pharmacologique a été la défibrillation cardiaque en 1950 au Canada, puis aux Etats-Unis, ce qui a permis le développement mondial de la chirurgie cardiaque dont la fibrillation ventriculaire était le risque principal. Le défibrillateur a été ensuite utilisé pour interrompre les autres types de tachycardie, parfois remplacé par une stimulation électrique rapide avec une sonde intracardiaque. Les premiers défibrillateurs implantables comme les stimulateurs l’ont été en 1980, aux Etats-Unis pour traiter instantanément la fibrillation ventriculaire, mécanisme de la plupart des morts subites cardiaques. Cependant les récidives de ces fibrillations doivent être prévenues par des médicaments. Par contre la plupart des autres tachycardies peuvent être prévenues par la destruction sélective de leur zone d’origine,  souvent guérison définitive. La méthode était chirurgicale dans les années 70, remplacée à partir des années 80 par l’emploi de cathéters, sondes spéciales introduites dans le cœur par voie veineuse ou artérielle, dites « d’ablation », provoquant une brulure localisée avec la chaleur, le froid, ou une énergie électrique. Certaines tachycardies ventriculaires non accessibles aux cathéters peuvent être traitées par radiothérapie transthoracique. La technologie des sondes s’est complexifiée par l’adjonction de multiples senseurs physiques. D’abord réservées aux tachycardies rebelles, les indications d’ablation se sont largement étendues depuis le début des années 2000 aux cas moins graves, en particulier pour la fibrillation atriale grâce aux travaux de l’équipe bordelaise.

Histoire de l'unité de rythmologie

Le département de rythmologie de l’hôpital de la Salpétrière a beaucoup contribué à l’évolution des traitements antiarythmiques. Il y a été fondé au début des années 1970, dans le service du Pr Yves Grosgogeat, par le Dr Guy Fontaine, rejoint en 1973 par le Dr Robert Frank à une époque où la rythmologie était débutante, avec quelques centres en France. Couplé à une des premières unités de surveillance monitorée, on y pratiquait déjà l’implantation des stimulateurs cardiaques, des explorations électrophysiologiques par cathéter, et enfin la recherche de traitements pharmacologiques. Ces médecins ont étés les pionniers des méthodes ablatives, d’abord chirurgicales avec le Pr Guiraudon dans le service du Pr Cabrol, pour la section de voies accessoires de conduction dans le cœur, puis pour la localisation et la section des tissus ventriculaires entretenant des tachycardies ventriculaires, interventions qui ont fait la réputation internationale de l’équipe. Elles ont aussi permis de faire reconnaitre par la communauté médicale une maladie méconnue du ventricule droit, la dysplasie ventriculaire droite arythmogène, souvent génétique, cause de tachycardies et de mort subite du sujet jeune, en particulier sportif.

Les méthodes d’ablation par cathéter sont aussi nées dans le centre grâce à un « heureux hasard ». Ce fut le rapport en 1978 d’un cas de bloc auriculaire inhabituel. Il avait été provoqué par l’énergie d’un choc de défibrillation externe conduite accidentellement par un cathéter sur le faisceau de His, voie de conduction des oreillettes vers les ventricules. Cela a donné l’idée d’appliquer cette énergie pour créer volontairement ce bloc dans certaines tachycardies, puis sur les voies accessoires, et sur les tachycardies ventriculaires sans avoir besoin du chirurgien. Ces ablations par cathéter ont débuté en 1983 à la Salpétrière, sous le nom de « fulguration », comme dans d’autres centres spécialisés dans le monde et se sont substituées aux interventions chirurgicales. Peu répandue du fait de sa complexité, la méthode a été remplacée en 1990 par celle, plus simple et toujours actuelle, d’ablation thermique par radiofréquence.

En 1978 l’unité a été autonomisée à l’hôpital Jean Rostand d’Ivry sous la direction des mêmes responsables, accompagnés d’autres rythmologues, avec des installations nouvelles, informatisées, et de nombreux stagiaires étrangers.  Elle y a poursuivi ses activités d’implantation des stimulateurs, premier centre de l’assistance publique, et de traitement des troubles du rythme complexes par ablation, chirurgicale puis endocavitaire. Elle a participé aux nombreuses innovations technologiques survenues au fil des années, comme l’emploi de cryoélectrodes, ou récemment de l’électroporation électrique. La plus spectaculaire a été en 1995 la technologie permettant d’établir des cartes d’activations  électriques 3D cardiaques, ne laissant qu’un rôle complémentaire aux images radiologiques. Elles ont permis de localiser exactement la position des sondes dans les volumes cardiaques et de mieux analyser les zones arythmogènes, retrouvant en cela l’ancienne expérience de la chirurgie cardiaque.

En 2002, le service a été intégré au département de cardiologie du nouvel institut de cardiologie de la Pitié Salpétrière encore sous la direction du Dr Robert Frank, puis du Dr Françoise Hidden-Lucet et depuis 2021 du Pr Estelle Gandjbakhch. Au long de ces années, répondant aux besoins médicaux et aux évolutions technologiques, l’unité a été agrandie (25 lits dont 12 de soins intensifs rythmologiques), équipe médicale et paramédicale s’est étoffée, de nouvelles salles interventionnelles ont été ouvertes, pour répondre au nombre croissant d’indications d’ablation des troubles du rythme (moins de 500 ablations /an en 2010 à plus de 1200 actuellement), soit le plus grand centre public d’ïle de France et le 6ème à l’échelle nationale, privé et public confondus. La réunion dans un même bâtiment des services de réanimation, de cardiologie interventionnelle, de chirurgie cardiaque, de transplantation cardiaque et de rythmologie permet la prise en charge concomitante de patients extrêmement complexes à plusieurs équipes. Parallèlement, l’unité de cardiologie ambulatoire simplifie la prise en charge des interventions simples. L’organisation d’une plateforme de télésurveillance des stimulateurs et des défibrillateurs implantables a permis d’optimiser la sécurité des patients tout en limitant les consultations de routine. Toutes les interventions de rythmologie simples et complexes y sont pratiquées. L’unité dispose des trois systèmes de navigation en 3D commercialement disponible, et est un centre pilote dans lequel sont déployés les dernières innovations technologiques des industriels. L’ablation de fibrillation atriale par électroporation est réalisée depuis cette année. L’unité est un centre de recours pour l’ablation des tachycardies ventriculaires, interventions qui peuvent être particulièrement complexes. Elle est également un centre de recours pour les extractions de matériel, en collaboration avec la chirurgie cardiaque. L’équipe a également développé des thématiques de recherche et interventionnelles coopératives dans différents domaine : génétique des cardiomyopathies, ablation hybride de la fibrillation atriale (intervention microchirurgicale et endocavitaire en double équipe dans le même temps opératoire), tout en gardant son rôle référent dans le domaine de la dysplasie du ventricule droit dont la plus grosse cohorte française reste suivie dans le service, et des orages rythmiques de troubles du rythme ventriculaires pour lesquels la Pitié-Salpétrière est un centre de recours.

Histoire

Histoire de la rythmologie

La rythmologie cardiaque est une spécialité de la cardiologie qui concerne les troubles du rythme cardiaque, rapides (tachycardies), lents (bradycardies) ou irréguliers (extrasystoles, fibrillation des oreillettes). Elle s’est individualisée du fait de méthodes d’investigations particulières et de traitements non pharmacologiques nécessitant une formation particulière des médecins.

Depuis l’antiquité les anomalies du rythme du pouls ou des bruits du cœur étaient considérées comme annonçant un risque inquiétant de maladie cardiaque. Ces troubles peuvent être asymptomatiques, se manifester par des palpitations, être une des causes de syncopes, de mort subite. La compréhension des troubles du rythme cardiaque est devenue possible en 1903 avec l’invention de l’électrocardiographe par le physiologiste hollandais Willem Einthoven. Les études initiales du cardiologue anglais Thomas Lewis, suivies de beaucoup d’autres, en particulier en Europe et aux Etats-Unis ont permis d’en comprendre les mécanismes. Enfin à partir des années 60, les connaissances dans ce domaine vont considérablement s’étendre et permettre de proposer des traitements plus efficaces, avec le cathétérisme cardiaque, les électrocardiogrammes endo- cavitaires, la stimulation électrique des mêmes cavités, ainsi que l’enregistrement continu ambulatoire de l’ECG, dit « de Holter » du nom de l’inventeur du procédé.

Les bradycardies graves n’ont pas eu de traitement avant la stimulation électrique du cœur, d’abord à partir de générateurs externes en 1951, puis miniaturisée grâce aux premiers transistors, boitiers de stimulateurs cardiaques devenus ainsi implantables en sous cutané au début des années 60, avec des électrodes d’abord cousues sur le cœur, puis avec des sondes introduites par voie veineuse dans ses cavités. Depuis ce sont des micro-ordinateurs implantés, dont certains directement dans le ventricule droit.

La plupart des tachycardies restent prévenues de nos jours par des prises régulières de médicaments dits antiarythmiques, découverts au fil du vingtième siècle.  On peut en interrompre les accès par des injections intraveineuses avec les mêmes substances. La première interruption non pharmacologique a été la défibrillation cardiaque en 1950 au Canada, puis aux Etats-Unis, ce qui a permis le développement mondial de la chirurgie cardiaque dont la fibrillation ventriculaire était le risque principal. Le défibrillateur a été ensuite utilisé pour interrompre les autres types de tachycardie, parfois remplacé par une stimulation électrique rapide avec une sonde intracardiaque. Les premiers défibrillateurs implantables comme les stimulateurs l’ont été en 1980, aux Etats-Unis pour traiter instantanément la fibrillation ventriculaire, mécanisme de la plupart des morts subites cardiaques. Cependant les récidives de ces fibrillations doivent être prévenues par des médicaments. Par contre la plupart des autres tachycardies peuvent être prévenues par la destruction sélective de leur zone d’origine,  souvent guérison définitive. La méthode était chirurgicale dans les années 70, remplacée à partir des années 80 par l’emploi de cathéters, sondes spéciales introduites dans le cœur par voie veineuse ou artérielle, dites « d’ablation », provoquant une brulure localisée avec la chaleur, le froid, ou une énergie électrique. Certaines tachycardies ventriculaires non accessibles aux cathéters peuvent être traitées par radiothérapie transthoracique. La technologie des sondes s’est complexifiée par l’adjonction de multiples senseurs physiques. D’abord réservées aux tachycardies rebelles, les indications d’ablation se sont largement étendues depuis le début des années 2000 aux cas moins graves, en particulier pour la fibrillation atriale grâce aux travaux de l’équipe bordelaise.

Histoire de l'unité de rythmologie

Le département de rythmologie de l’hôpital de la Salpétrière a beaucoup contribué à l’évolution des traitements antiarythmiques. Il y a été fondé au début des années 1970, dans le service du Pr Yves Grosgogeat, par le Dr Guy Fontaine, rejoint en 1973 par le Dr Robert Frank à une époque où la rythmologie était débutante, avec quelques centres en France. Couplé à une des premières unités de surveillance monitorée, on y pratiquait déjà l’implantation des stimulateurs cardiaques, des explorations électrophysiologiques par cathéter, et enfin la recherche de traitements pharmacologiques. Ces médecins ont étés les pionniers des méthodes ablatives, d’abord chirurgicales avec le Pr Guiraudon dans le service du Pr Cabrol, pour la section de voies accessoires de conduction dans le cœur, puis pour la localisation et la section des tissus ventriculaires entretenant des tachycardies ventriculaires, interventions qui ont fait la réputation internationale de l’équipe. Elles ont aussi permis de faire reconnaitre par la communauté médicale une maladie méconnue du ventricule droit, la dysplasie ventriculaire droite arythmogène, souvent génétique, cause de tachycardies et de mort subite du sujet jeune, en particulier sportif.

Les méthodes d’ablation par cathéter sont aussi nées dans le centre grâce à un « heureux hasard ». Ce fut le rapport en 1978 d’un cas de bloc auriculaire inhabituel. Il avait été provoqué par l’énergie d’un choc de défibrillation externe conduite accidentellement par un cathéter sur le faisceau de His, voie de conduction des oreillettes vers les ventricules. Cela a donné l’idée d’appliquer cette énergie pour créer volontairement ce bloc dans certaines tachycardies, puis sur les voies accessoires, et sur les tachycardies ventriculaires sans avoir besoin du chirurgien. Ces ablations par cathéter ont débuté en 1983 à la Salpétrière, sous le nom de « fulguration », comme dans d’autres centres spécialisés dans le monde et se sont substituées aux interventions chirurgicales. Peu répandue du fait de sa complexité, la méthode a été remplacée en 1990 par celle, plus simple et toujours actuelle, d’ablation thermique par radiofréquence.

En 1978 l’unité a été autonomisée à l’hôpital Jean Rostand d’Ivry sous la direction des mêmes responsables, accompagnés d’autres rythmologues, avec des installations nouvelles, informatisées, et de nombreux stagiaires étrangers.  Elle y a poursuivi ses activités d’implantation des stimulateurs, premier centre de l’assistance publique, et de traitement des troubles du rythme complexes par ablation, chirurgicale puis endocavitaire. Elle a participé aux nombreuses innovations technologiques survenues au fil des années, comme l’emploi de cryoélectrodes, ou récemment de l’électroporation électrique. La plus spectaculaire a été en 1995 la technologie permettant d’établir des cartes d’activations  électriques 3D cardiaques, ne laissant qu’un rôle complémentaire aux images radiologiques. Elles ont permis de localiser exactement la position des sondes dans les volumes cardiaques et de mieux analyser les zones arythmogènes, retrouvant en cela l’ancienne expérience de la chirurgie cardiaque.

En 2002, le service a été intégré au département de cardiologie du nouvel institut de cardiologie de la Pitié Salpétrière encore sous la direction du Dr Robert Frank, puis du Dr Françoise Hidden-Lucet et depuis 2021 du Pr Estelle Gandjbakhch. Au long de ces années, répondant aux besoins médicaux et aux évolutions technologiques, l’unité a été agrandie (25 lits dont 12 de soins intensifs rythmologiques), équipe médicale et paramédicale s’est étoffée, de nouvelles salles interventionnelles ont été ouvertes, pour répondre au nombre croissant d’indications d’ablation des troubles du rythme (moins de 500 ablations /an en 2010 à plus de 1200 actuellement), soit le plus grand centre public d’ïle de France et le 6ème à l’échelle nationale, privé et public confondus. La réunion dans un même bâtiment des services de réanimation, de cardiologie interventionnelle, de chirurgie cardiaque, de transplantation cardiaque et de rythmologie permet la prise en charge concomitante de patients extrêmement complexes à plusieurs équipes. Parallèlement, l’unité de cardiologie ambulatoire simplifie la prise en charge des interventions simples. L’organisation d’une plateforme de télésurveillance des stimulateurs et des défibrillateurs implantables a permis d’optimiser la sécurité des patients tout en limitant les consultations de routine. Toutes les interventions de rythmologie simples et complexes y sont pratiquées. L’unité dispose des trois systèmes de navigation en 3D commercialement disponible, et est un centre pilote dans lequel sont déployés les dernières innovations technologiques des industriels. L’ablation de fibrillation atriale par électroporation est réalisée depuis cette année. L’unité est un centre de recours pour l’ablation des tachycardies ventriculaires, interventions qui peuvent être particulièrement complexes. Elle est également un centre de recours pour les extractions de matériel, en collaboration avec la chirurgie cardiaque. L’équipe a également développé des thématiques de recherche et interventionnelles coopératives dans différents domaine : génétique des cardiomyopathies, ablation hybride de la fibrillation atriale (intervention microchirurgicale et endocavitaire en double équipe dans le même temps opératoire), tout en gardant son rôle référent dans le domaine de la dysplasie du ventricule droit dont la plus grosse cohorte française reste suivie dans le service, et des orages rythmiques de troubles du rythme ventriculaires pour lesquels la Pitié-Salpétrière est un centre de recours.

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